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La charge utile DIAL du premier vol Diamant B (10 mars 1970)

La première charge utile confiée à Diamant B comportait 2 parties :

  • MIKA, une capsule technologique, solidaire du 3e étage et réalisée par Junkers M. B. B. pour le compte du CNES : destinée à fournir des données sur le fonctionnement du lanceur, elle a une vie utile limitée à 1 heure environ ;
  • WIKA, une capsule scientifique satellisée, également réalisée par Junkers M. B. B. pour le compte de la Gsellschaft fûr Weltraumforschung (GfW) allemand de recherche spatiale.

 

Le protocole d’accord signé le 18 février 1969 entre le Ministère fédéral allemand de la recherche (BMwF) et le CNES pour la réalisation du programme DIAL précisait que le CNES, maître d’œuvre du lanceur et de la capsule technologique, était responsable des moyens à mettre en œuvre au C. S. G. et du lancement, tandis que la GfW était maître d’œuvre du satellite WIKA.

Quant aux opérations qui suivent l’injection sur orbite, c’est plus précisément le Centre d’Opérations de Brétigny (COBY) qui en a assuré la préparation et le « suivi », ainsi que la coordination des travaux des organismes participants. le COBY assure en particulier la mise en œuvre des stations au sol, la surveillance et le contrôle journalier du satellite et la réduction des données scientifiques.

Le réseau de stations chargées de repérer et « d’écouter » le satellite comporte :

  • 4 stations du CNES, Kourou, Brazzaville, Ouagadougou et Pretoria ;
  • la station du CECLES-ELDO à Fortalezza (Brésil), à environ 2 000 km en aval du C. S. G. ;
  • 2 stations de la NASA (réception et enregistrement des télémesures), Quito au Pérou (longitude, 78,6 degrés Ouest ; latitude, 0,6 degré Sud) et Ascension (longitude, 14,3 degrés Ouest ; latitude, 7,9 degrés Sud).

La charge utile DIAL et la coiffe de Diamant B

MIKA

Pesant 52 kg, la capsule MIKA, dont la durée de vie est limitée à environ une heure, a été conçue pour fournir des informations sur le fonctionnement et les performances de Diamant B.

Grâce à sa chaîne de télémesure à 235 MHz, à son répondeur-radar en bande C et à sa balise stable (137,5 MHz), elle permet en effet :

  • de localiser le véhicule jusqu’à l’injection sur orbite ;
  • de restituer l’attitude de l’ensemble supérieur après séparation 2e / 3e étages ;
  • de déterminer la vitesse de rotation de cet ensemble ;
  • de mesurer les niveaux vibratoires au-dessus du 3e étage ;
  • d’étudier les conditions de largage de la coiffe.

Sa structure simple (longueur totale, 80 cm) comporte un tronc de cône, un plateau principal support d’équipements et un plateau secondaire qui porte un bloc gyrométrique.

Schéma de la charge utile DIAL

WIKA

WIKA est un satellite d’aéronomie de 63 kg, stabilisé par mise en rotation et conçu pour déterminer la distribution dans l’espace du rayonnement géocoronal et son mécanisme d’excitation, avec mesure du rayonnement Lyman alpha, comptage des particules de grande énergie entrant dans l’atmosphère équatoriale et étude de l’électrojet équatorial – un courant de particules qui circule, pendant le jour, au niveau de l’équateur magnétique.

Ces 4 expériences embarquées ont d’ailleurs dégà fonctionné à bord de fusées-sondes.

WIKA comporte 2 ensemble structurau (12 kg) :

  • une plateforme porte-batteries, solidaire de l’adaptateur mécanique qui assure la liaison MIKA-WIKA jusqu’à leur séparation et surmontée d’un tube central à base octogonale, sur lequel repose l’anneau qui porte la sonde de mesure de la densité thermique;
  • une double enveloppe de protection thermique et les systèmes de fixation pour le montage des expériences et de l’électronique associée ; le contrôle thermique, entièrement passif, assure le maintien entre 10 et 20 degrés C de la température des équipements.

WIKA est stabilisé par la mise en rotation du 3e étage, à la vitesse de 180 tours/minute ; l’attitude est connue (à 10 degrés près) grâce au magnétomètre de l’expérience scientifique et à un senseur solaire, qui font leurs mesures dans des plans perpendiculaires ; lorsque l’axe du magnétomètre est perpendiculaire au champ terrestre, le signal qu’il délivre devient nul ; en comptant l’intervalle de temps qui sépare 2 zéros, une horloge détermine la période de rotation du satellite ; pour sa part, le senseur solaire mesure l’angle entre l’axe du satellite et la direction du Soleil.

WIKA est alimenté par une batterie argent-zinc (28,4 V ± 10%), renforcée par 2 générateurs solaires formés chacun de 111 cellules  photovoltaïques au silicium.

Après les 8 premières orbites, un interrupteur piloté par un compteur d’orbites arrête l’alimentation en énergie pendant 2 orbites consécutives puis la rétablit pendant l’orbite suivante, et ceci régulièrement ; un autre interrupteur, qui ne fonctionne que pendant les phases d’émission, alimente l’expérience « Lyman alpha » quand le satellite est dans l’ombre puis l’exprience « mesure magnétique de l’électrojet » quand le satellite est éclairé.

Les télémesures, du type P. C. M., toutes émises en temps réel, sont enregistrées lors de chaque passage utile du satellite par les 3 stations équatoriales du CNES (Kourou, Ouadadougou et Brazzaville), Fortalezza et Quito ainsi que par une station mobile italienne (Nairobi) ; la station d’Ascension n’enregistre que 3 passages par jour ; il n’y pas de réception de télécommande à bord, le seul ordre nécessaire, celui de séparation d’avec MIKA, étant donné par le séquenceur du 3e étage de Diamant B.

Mesure du rayonnement Lyman alpha (1215,6 Å) dans la géocouronne

La géocouronne est la ceinture d’hydrogène qui entoure la Terre à partir d’environ 80 km d’altitude et sur une épaisseur de plusieurs rayons terrestres.

L’expérience, qui ne fonctionne que lorsque le satellite se trouve dans l’ombre de la Terre, est faite par 3 senseurs associés chacun à 2 chambres d’ionisation et placés à 30, 90 et 150 degrés de l’axe de rotation du satellite, ce qui permet de balayer tout l’espace et donc de connaître la distribution du rayonnement en fonction de son intensité. Le rayonnement Lyman alpha prend engrande partie naissance au cours d’interactions entre des protons Lyman alpha solaires diffusés par résonance et des atomes d’hydrogène neutre. Mesurer l’intensité des rayonnements diffusés revient donc à mesurer la concentration du milieu en hydrogène, concentration qui varie notablement au cours de la journée et en fonction de l’activité solaire.

Mesure de la densité électronique

Une sonde à capacité dont l’impédance varie avec la densité électronique, placée à l’extrémité d’une électrode de protection, pour éviter de perturber le plasma, assure les mesures à toutes les altitudes balayées par le satellite.

Mesure de particules de grande énergie

On cherche à déterminer l’influence de l’anomalie du champ géomagnétique au-dessus de l’Atlantique-Sud sur la population des particules près de la limite inférieure de la ceinture de rayonnements, influence dont on sait qu’elle varie en fonction de l’activité solaire.

Avant d’être comptées, les particules détectées sont classées par des discriminateurs selon leur gamme d’énergie (≥ 1,3 MeV pour les électrons ; entre 5 et 40 MeV pour les protons et entre 5 et 40 MeV par nucléon pour les particules alpha).

Mesure de l’électrojet équatorial

Il s’agit de mesurer, dans une zone qui va de l’Amérique du Sud à l’Afrique et jusqu’à 1 000 km d’altitude, l’intensité du champ magnétique total et d’en déduire la part qui est due à la ceinture équatoriale de particules appelée électrojet ; on aurait pu mesurer directement la composante due au champ champ géomagnétique en faisant cette mesure de nuit, puisque l’électrojet est un phénomène qui ne se produit que de jour ; en fait, on calcule l’intensité de ce champ d’après la position du satellite. Etant donné la dérive du périgée (350 km d’altitude) dans le temps au-dessus de la Terre, on pourra mettre en évidence les variations de l’électrojet en fonction de la longitude, son intensité en fonction du temps local et sa position par rapport à l’équateur magnétique, les mesures faites au-dessus de l’Atlantique acquérant ainsi un intérêt tout particulier puisque le pla de l’orbite coupe alors l’équateur magnétique.

Une bobine, dite « de recherche  » et placée perpendiculairement par rapport à l’axe de rotation du satellite, fonctionne en continu, provoquant, chaque fois qu’elle mesure un champ d’intensité comprise entre 22 000 et 30 000 gammas, la mise en service de 2 autres bobines (les sondes de Forster) ; celles-ci mesurent à leur tour le champ selon 2 directions, suivant le plan de la bobine de recherche (résolution de ± 1,85 gammas) et suivant un axe parallèle à l’axe de rotation (résolution, ± 8 gammas) ; on s’attend à mesurer au périgée une composante d’environ 50 gammas due à l’électrojet.

Rappelons que, en plus de son intérêt scientifique, cette mesure est utile pour connaître l’inclinaison de l’axe principal du satellite par rapport au champ géomagnétique (connaissance de l’attitude).

Article paru dans la revue CNES « La recherche spatiale » Volume IX – N°1 – Janvier 1970

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